« Sexes et races, deux réalités »: une réponse à Nancy Huston et Michel Raymond

La romancière Nancy Huston et Michel Raymond, « spécialiste de biologie évolutionniste », ont publié le 17 mai dans Le Monde une tribune intitulée « Sexes et races, deux réalités ».

La première a publié récemment un ouvrage qui se veut une charge contre la fameuse « théorie du genre »: Reflets dans un oeil d’homme (Actes Sud, 2012). Son cheval de bataille: la reconnaissance du déterminisme biologique façonnant notamment les comportements sexuels des hommes et des femmes, qui serait nié par le genre, présenté comme une idéologie. Il faut, écrit-elle, replacer l’humain dans une continuité biologique avec le règne animal, continuité qui se manifesterait par exemple ainsi:

    Grossièrement exprimé, les jeunes femelles humaines tout comme les guenons tiennent à séduire les mâles, car elles veulent devenir mères. Pour atteindre cet objectif, elles se font belles. Aveuglés par nos idées modernes sur l’égalité entre les sexes, que nous refusons de concevoir autrement que comme l’identité entre les sexes, nous pouvons faire abstraction un temps de cette réalité énorme, mais, si l’on n’est pas totalement barricadé derrière nos certitudes théoriques, il y aura toujours un électrochoc pour nous le rappeler.

Elle s’appuie notamment sur les thèses de la psychologie évolutionniste, dont Michel Raymond (co-auteur de la tribune) est un représentant. Ses travaux portent sur le déterminisme génétique de l’homosexualité chez l’homme. Sur le blog Allodoxia (Observatoire de la vulgarisation scientifique), Odile Fillod en parle dans un article intitulé « Les tours de passe-passe de la psychologie évolutionniste du genre ». Elle écrit aussi, dans « Psychologie évolutionniste et biologie »:

    fonder en nature certaines différences entre les sexes dans les comportements sexuels conforte le sens commun, est conforme aux mythes savants (dont ceux produits par la psychanalyse), rassure quant à la certitude d’un fondement biologique solide des identités sexuées, et est susceptible d’attirer l’attention d’un public peu curieux de sciences mais toujours intéressé par la sexualité, celle-ci constituant justement l’un des derniers refuges des identifications de sexe mises à mal par les évolutions sociales.

Il est important de commencer par cette mise au point pour situer la tribune publiée par Le Monde. Sous couvert d’énoncer des vérités dérangeantes (des « réalités ») détachées de toute idéologie, Nancy Huston et Michel Raymond ne font en fait qu’énoncer des thèses éculées et rétrogrades faisant appel au sens commun pour disqualifier les sciences humaines et sociales.

L’opposition entre faits naturels et idéologie

Leur texte repose sur la construction d’un antagonisme entre « nature » et sciences naturelles d’un côté et idéologie et sciences humaines et sociales de l’autre. Leur incompatibilité est posée d’emblée: « sciences humaines et sciences naturelles ne font pas bon ménage. » D’un côté, on a les « réalités » du sexe et du genre, c’est à dire des « faits physiques et biologiques », déterminés par des « lois biologiques ». C’est le côté de la « nature » et du « monde vivant », où règnent les « différences ». De l’autre, les sciences humaines et sociales se caractériseraient par opposition aux sciences naturelles, mieux encore: par leur « dénégation des faits physiques et biologiques », du « déterminisme biologique », leur « cécité volontaire, obstinée, parfois loufoque » aux sciences naturelles et aux différences (de sexe et de race) constituées en nature. De ce côté on soutient des « thèses », on utilise des « concepts philosophiques » au lieu de parler de faits biologiques, on est partisan de théories comme « la théorie du genre », qui appartient à un ensemble de « mythes modernes ». On promeut des idées « généreuses » (entendre: l’égalité) mais « farfelues », en somme: des « inanités ».

Étrangement, les auteurs ajoutent in extremis que les sciences naturelles peuvent être, elles aussi, aveugles aux SHS et que « nous avons tout intérêt à partager nos différents savoirs ». Une négation de l’affirmation initiale de leur incompatibilité, donc?

Cet antagonisme repose non seulement sur l’idée de « nature », qui n’est bien sûr jamais définie ni interrogée, mais aussi sur l’idée que puisque les « sciences naturelles » (en fait la biologie) étudient la nature, elles énoncent des « faits », des « réalités » coupés de toute idéologie et de toute vision humaine. Étudiant la « nature », elles seraient par essence objectives. « La génétique moderne » (pourtant contredite dans cette tribune, j’y reviendrai), nous dit-on, « se contente de décrire » – nous voilà donc rassuré·e·s: les sciences naturelles ont changé. On n’en est plus à l’époque où la phrénologie, par exemple, servait à repérer des criminels nés ou à justifier l’esclavage par la soumission « naturelle » des Noir·e·s. Des énoncés se donnant comme scientifiques, comme « Homo sapiens, à partir d’une même souche africaine voici soixante-dix mille à cent mille années, a évolué de façon relativement autonome dans différentes parties du globe et s’est peu à peu diversifié en sous-espèces, ou variétés, ou – pardon ! – races différentes » [sic], n’impliqueraient donc « aucun jugement de valeur »: il s’agirait d’un énoncé purement descriptif, et, donc, objectif.

L’idée de nature et la force de l’évidence

L’idée qu’à partir du moment où l’on parle de « nature », on serait dans le domaine des « faits » et par conséquent de l’objectivité, trouve un écho puissant dans le sens commun. Pourtant, l’objectivité prétendue des sciences non-humaines, en particulier des sciences naturelles, a depuis longtemps été dénoncée comme un mythe. De plus, l’idée de nature sert ici à présenter les « faits » avancés comme « irréfutables »: « Ces mythes modernes ont en commun avec les religions de reposer sur la dénégation tranquille de faits physiques et biologiques avérés et irréfutables » – à savoir la différence des races et des sexes. Les auteurs ne parlent pas de « théories », bien sûr: les théories sont réservées aux sciences humaines et sociales. Il n’est question que de « faits avérés et irréfutables ». Tant pis s’ils ont, justement, été réfutés: cela est forcément le fait d’idéologues.

L’utilisation de l’idée de « nature » permet de présenter la race et le sexe comme des réalités matérielles. L’existence de différences de sexe et de race est présentée comme « un fait avéré et irréfutable »; cela voudrait donc dire que les catégories de sexe et de race constituent, elles-mêmes, des faits avérés et irréfutables. Le sexe et la race ne sont plus des catégories: ce sont des faits, des « réalités ». L’idée de nature est donc indissociable de ces notions; elle permet de faire passer le sexe et la race pour des réalités préalables à tout discours, à toute analyse, existant indépendamment du regard porté sur elles – indépendamment, donc, de toute idéologie. L’idée de nature permet par conséquent de masquer la dimension sociale des catégories mêmes de sexe et de race: il ne s’agirait pas de catégories imposées sur la nature, mais de faits naturels qu’on se contenterait de décrire.

Le texte repose paradoxalement à la fois sur un discours scientifisant (le parti-pris des faits, de la nature, de la science) et sur l’évidence du sens commun. En effet, l’expérience ne peut pas infirmer l’existence de différences sexuelles et de différences entre les groupes humains (« races », « sous-espèces », « variétés »: les termes sont employés de manière interchangeable…). Qui nierait que l’espèce humaine est sexuée? Qu’on observe des caractères sexuels différents selon les hommes et les femmes? Qu’il existe des caractéristiques différentes selon les groupes humains, comme la couleur de la peau?

Il n’y a bien que les idéologues des SHS pour nier cela – mais le nient-ils/elles? On nous parle en effet de « l’idée selon laquelle toutes les différences non physiologiques entre hommes et femmes seraient construites (‘la théorie du genre’, introduite depuis peu dans les manuels scolaires français) ». La grande, méchante « théorie du genre » nierait donc les « différences non-physiologiques » – quel rapport alors avec la « nature »? Pourtant, les phrases suivantes contredisent ce constat:

    Dans le monde vivant, mâles et femelles diffèrent toujours biologiquement, y compris pour une partie de leurs comportements, car chaque sexe a une façon spécifique de se reproduire, ainsi chez les gorilles, chimpanzés et bonobos, dont nous sommes les plus proches cousins. Quelle force mystérieuse aurait effacé ces différences dans notre espèce à nous ?

Il est donc finalement bien question des différences physiologiques? Il faudrait savoir.

Pour accéder à la vérité des faits il suffit de « chercher à les connaître », ce que ne feraient pas les SHS. La différence sexuée, par exemple, est une évidence observable, tangible:

    Les faits, quand on cherche à les connaître, nous montrent que déjà à la naissance – donc avant toute influence sociale – filles et garçons n’ont pas les mêmes comportements. Et comment ne pas reconnaître que le pic d’hormones de la puberté, que partagent les adolescents humains avec les adolescents chimpanzés, a une origine biologique et un effet marqué sur les comportements ?

Le premier « fait » semble très prisé par Michel Raymond, on en attend cependant toujours des preuves. Comme l’écrit Odile Fillod,

    Il faudra […] que Michel Raymond nous indique les références des études scientifiques ayant montré qu’à la naissance, garçons et filles ont déjà des comportements différents. On pourra alors discuter des causes et conséquences possibles de ce phénomène. Concernant les effets putatifs de la testostérone, un long développement serait nécessaire pour montrer non seulement que l’influence biologique « masculinisante » de la testostérone sur les traits psycho-comportementaux […] n’est pas démontrée, mais en outre que la littérature scientifique indique que si une telle influence existait, elle serait très ténue.

Avec de tels « faits », écrit encore Odile Fillod,  » Toutes les pièces du puzzle semblent réunies pour expliquer cette parfaite continuité entre un comportement animal et un comportement humain ». Pourtant,

    lorsqu’on prend la peine de l’examiner soigneusement – ce qu’entre autres Rebecca Jordan-Young a fait –, ce qui ressemble de loin à un « faisceau d’indices convergents » (selon l’expression consacrée à défaut de l’existence de preuves) s’avère être une somme d’observations parfois contradictoires, souvent entachées de biais méthodologiques et presque toujours ambiguës.

« Le mot ‘race’ fait peur »

La rhétorique est bien connue: nous osons, nous, dire tout haut ce que beaucoup pensent tout bas, ce qui fait peur, ce qui n’est pas politiquement correct (vive nous). Mais qui pense cela? Les scientifiques? Certainement pas: si le terme de « race » a été remis en cause, c’est pour des raisons biologiques que je vais schématiser ci-dessous. Alors qui? Toutes les personnes qui cherchent dans la science la confirmation de leurs préjugés? Ce qui est certain, c’est que cette tribune a fait plaisir à pas mal de monde.

Cet article du Point résume bien la question: il existe une seule race, mais sept groupes génétiques. La tribune du Monde ne cesse de mettre en avant les différences:  » La diversité de l’espèce humaine est grande : une partie de notre héritage génétique est largement partagée, mais une autre est caractéristique de groupes géographiques. » Pourtant, les études les plus récentes (encore faudrait-il, pour les connaître, ne pas se cantonner à la science du XIXème siècle) montrent que les 6 milliards d’humains possèdent un génome à 99,9 % identique, ce qui est unique parmi les mammifères. La variabilité génétique dans l’espèce humaine est donc très faible, mais elle existe bien et permet de déterminer l’existence de sept groupes biologiques: les Africains subsahariens, les Européens, les habitants du Moyen-Orient, les Asiatiques de l’Est, les Asiatiques de l’Ouest, les Océaniens et les Indiens d’Amérique. L’article de Frédéric Lewino précise encore que « deux membres d’un même groupe peuvent être plus éloignés, globalement, que deux individus appartenant à deux groupes distincts (Européens et Africains, par exemple) ».

Citons encore Raymond et Huston:

    Les médecins savent qu’il existe une variation dans la réponse aux médicaments – les psychotropes par exemple – selon le groupe auquel appartient le malade. Les Inuits sont adaptés au froid, tout comme les sherpas de l’Himalaya sont adaptés à la vie en altitude.

Les Inuits, les sherpas de l’Himalaya constitueraient donc des races? Première nouvelle. Passons. « Les médecins savent que »: pas si vite. Frédéric Lewino évoque l’obtention en 2005 par une société américaine de la première homologation d’un médicament « racial » destiné aux Noirs, « censé soigner l’insuffisance cardiaque, plus fréquente chez les Américains d’origine africaine, sans que la raison en soit connue ». Cette homologation a été vivement contestée: Lewino évoque les travaux de Bertrand Jordan, biologiste moléculaire, pour qui l’efficacité de ce médicament « est la même quel que soit le malade, blanc, noir ou jaune. Pis : ce remède, vendu très cher, ne fait qu’associer deux vieilles molécules commercialisées à bas prix depuis longtemps ! Ce qui explique sans doute son flop commercial ».

Si les sciences modernes ont dépassé le concept de « race » en biologie, ce n’est donc pas seulement parce qu’il a été utilisé à des fins oppressives voire génocidaires – même si cette raison paraît déjà puissante. C’est parce qu’il ne permet pas de décrire l’espèce humaine. La « variabilité d’une espèce » est un ensemble de statistiques obtenues à partir d’un nombre suffisant de critères caractérisant cette espèce – la couleur de peau ayant été choisie comme critère privilégié, et ne représentant pourtant qu’un critère parmi de multiples autres. Or toutes les mesures globales des phénotypes humains démontrent la remarquable homogénéité de l’espèce.

Une rhétorique religieuse?

Les « mythes modernes » niant l’existence des races et des sexes sont comparés aux religions: il s’agirait de nouveaux obscurantismes, niant l’évidence des « faits ». Pourtant cette tribune évoque elle-même la rhétorique chrétienne. L’inquiétude face à une dénaturation provoquée par les études de genre est ainsi partagée par le Vatican. Les auteurs fustigent « l’orgueil inné de l’humain » consistant à se croire unique au sein du monde vivant. Il faut également « passer outre ces réponses simplistes à des questions infiniment difficiles, car si nous continuons à ignorer et à maltraiter le monde, nous risquons de compromettre nos chances de survie »: quel est ce « monde » maltraité? On retrouve là le discours de la psychologie évolutionniste (mise en danger des chances de survie) mais aussi un écho du concept d' »écologie humaine » développé récemment par le Vatican. Dans un discours de 2008, Benoît XVI affirmait ainsi:

    [L’Église] ne doit pas seulement défendre la terre, l’eau et l’air comme des dons de la création appartenant à tous. Elle doit également protéger l’homme contre la destruction de lui-même. Il est nécessaire qu’il existe quelque chose comme une écologie de l’homme.

En ajoutant: « il ne s’agit pas d’une métaphysique dépassée, si l’Église parle de la nature de l’être humain comme homme et femme et demande que cet ordre de la création soit respecté ». Cette nature serait menacée par la « théorie du genre »: « ce qui est souvent exprimé et entendu par le terme ‘gender’ se résout en définitive dans l’auto-émancipation de l’homme par rapport à la création et au Créateur ».

Une émancipation par rapport à la création pour le Vatican, par rapport au monde naturel pour Huston et Raymond: voilà le danger qui guetterait l’humanité. L’idéologie est toujours dénoncée comme l’apanage du camp d’en face; pourtant, malgré sa prétention à l’objectivité scientifique, à l’indépendance politique et idéologique, ce texte traduit une idéologie non seulement rétrograde, mais allant à l’encontre même de la modernité démocratique. Une idéologie qui justifie les inégalités sociales en nature, en cherchant à faire passer l’existence des catégories de sexe et de race pour la cause naturelle de ces inégalités.

Edit: @Moossye me suggère cette citation de Christine Delphy, qui s’applique particulièrement bien ici et qui peut servir de conclusion:

    Toute connaissance est le produit d’une situation historique, qu’elle le sache ou non. Mais qu’elle le sache ou non fait une grande différence ; si elle ne le sait pas, si elle se prétend ‘neutre’, elle nie l’histoire qu’elle prétend expliquer, elle est idéologie et non connaissance. Toute connaissance qui ne reconnaît pas, qui ne prend pas pour prémisse l’oppression sociale, la nie, et en conséquence la sert objectivement.(L’Ennemi principal, tome 1, p. 265)

AC Husson

Merci à Lyokoï pour ses précieuses explications.

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Pour aller plus loin
D’autres réponses à Huston et Raymond sur les blogs Une heure de peine et Crêpe Georgette
Éric Fassin, « Les « forêts tropicales » du mariage hétérosexuel. Loi naturelle et lois de la nature dans la théologie actuelle du Vatican », Revue d’éthique et de théologie morale, 2010/HS (n° 261), p. 201-222.
Colette Guillaumin, L’Idéologie raciste, genèse et langage actuel, Paris/La Haye, Mouton, 1972. Nouvelle édition : Gallimard, Coll. Folio essais, 2002.
Colette Guillaumin, « Question de différence », Questions Féministes, n°6, septembre 1979, p. 3-21.
Sur le blog Allodoxia:
« Les tours de passe-passe de la psychologie évolutionniste du genre »
« Psychologie évolutionniste et biologie »

Sur le site du Point: « Une seule race, mais sept groupes biologiques »

40 réflexions sur “« Sexes et races, deux réalités »: une réponse à Nancy Huston et Michel Raymond

  1. Merci pour l’article…

    Pour les « races », j’avais entendu dire qu’en réalité ça n’a aucune signification car les humains ne forment pas des catégories, mais plutôt des « dégradés » de diversité génétique. Exemple : les Italiens du Sud sont aussi proches génétiquement des Italiens du Nord que des Arabes.

    Bref, il me semble que l’idée de race est mise à la mal depuis longtemps et je suis super étonnée qu’on nous la ressorte

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  2. Le rapport de Nancy Huston et Michel Raymond à la religion ne se trouve pas seulement dans le fait qu’ils reprennent des formulations et points de vue partagés avec le Vatican, mais dans la représentation même qu’ils présupposent de la vérité scientifique. Une des caractéristiques essentielles en effet des discours de vérité scientifiques est d’être discutables et soumis à l’esprit critique. La vérité scientifique est ainsi le contraire d’une vérité révélée, qui elle est indiscutable et à l’égard de laquelle le fait d’y adhérer relève d’un acte de foi. Ainsi, considérer que des vérités scientifiques sont irréfutables, c’est entretenir avec ces discours de vérité non pas un rapport scientifique, mais un rapport religieux.

    Par ailleurs, le fait d’accuser autrui de ce que l’on pratique soi-même (et ici, l’attitude religieuse à l’égard des vérités scientifiques se manifeste au moment même où l’adversaire est accusé de religiosité) s’appelle une projection. Et tout cela de manière « tranquille ».

    Enfin, si je parle de discours de vérité, c’est pour souligner que la vérité n’est pas une chose mais une production discursive qui prétend énoncer quelque chose de valable à propos de la réalité. Ainsi, un fait n’est pas une vérité, mais il est lui-même pris dans un procédé d’observation par lequel un sens lui est donné.

    Le moins que l’on puisse dire, donc, est que Nancy Huston et Michel Raymond font surtout la démonstration de leur incompétence scientifique.

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  3. Quand je lis des propos pareils, je hausse toujours un sourcil interrogateur. J’ai l’impression que ces personnes n’ont pas eu vent des thèses genre scientifiquement prouvée déconstruisant leur discours (mais il est vrai que puisque pour eux sciences humaines = caca, on pourra pas aller bien loin). Parce que genre le poids de la culture, l’inné, l’acquis, tussa, ça fait ptetre un siècle que c’est analysé ?

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  4. C’est juste hallucinant… L’argumentaire est pauvre à en pleurer… Il faudrait offrir à ces personnes un livre de Margaret Mead, il dirait moins de merde.

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  5. Merci pour ce très bel article.

    Connaissant déjà les objections qu’on va m’opposer si je le fais lire à certaines personnes, je voudrais m’assurer d’une chose : on est d’accord qu’il ne faut pas poser d’objet inquestionnable, si on veut construire là-dessus une théorie scientifique valable. Mais dans la citation finale de Delphy, est-ce que ce n’est pas ce qu’on fait avec « l’oppression sociale » ? Je connais peut-être mal le concept de « prémisse ». Est-ce synonyme de « fait avéré et indiscutable » ?

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  6. Pingback: Genre / transidentités | Pearltrees

  7. Le livre Sex At Dawn par Chris Ryan et Cacilda Jetha (pas encore traduit en français) procède à une déconstruction très efficace et convaincante du récit classique en psychologie de l’évolution comme quoi la pression de sélection aurait sélectionné chez nous un comportement monogame et jaloux et une différence d’expression du désir sexuel.

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  8. Merci pour cet article. Quid de la contribution d’une biologiste au débat, Anne Fausto-Sterling, dont Corps en tous genres n’a été traduit en français que l’an dernier ? C’est une lecture sur laquelle j’aimerais recueillir des avis avant de m’y plonger.

    A un autre niveau, et pour les personnes peu friandes d’épistémologie, je me suis amusée à aller chercher dans l’histoire des contre-exemples à nos vérités universelles et éternelles (car naturelles), dont le cliché colporté par Nancy Huston sur la violence du désir masculin irrépressible :

    Les hommes ont une libido irrépressible, tandis que les femmes s’intéressent peu au sexe.
    Au siècle des Lumières, les hommes étaient perçus comme froids, raisonneurs, inhibés par la civilisation. Les femmes en revanche n’avaient pas cette contrainte, leur tempérament était, à en croire la littérature, quasi-animal et très, très sexué. Des bombes hormonales ambulantes.
    http://blog.ecologie-politique.eu/post/Renversant

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    • Et au début du siècle dernier, on considérait que les femmes étaient plus douées pour les mathématiques que pour les lettres considérées comme plus noble à l’époque. Et comme les « sciences dures » ont repris le devant, ça c’est inversé, c’est fabuleux la « nature évidente ».

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      • Pareil pour l’informatique, c’était une discipline non genrée (50/50 à la fac) avant l’apparition de l’informatique domestique. S’il y a un seul ordi à la maison, il est pour le garçon et c’est ainsi que s’est développée une discipline ultra masculine. Démocratisation, qu’ils disent…

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  11. Merci infiniment pour ces explications, et les sources et citations. Faire ce travail de recherche est précieux, couteux en temps mais nécessaire. Un grand merci.

    J’ai aussi remarqué l’étrange vocabulaire et l’interchangeabilité des mots dans leur tribune, ce qui est toujours un signe qu’on veut vous manipuler. A noter qu’en université, en cours de linguistique et épistémologie, on vous enseigne à vous méfier de la fameuse « objectivité » des sciences dures et à chercher la part d’idéologie du scientifique.

    Bien sur si j’avais noté et mémorisé soigneusement mes cours, je me rappellerais des outils formels pour (tenter de) dégager les faits de l’idéologie d’un texte scientifique…

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  13. «…chaque sexe a une façon spécifique de se reproduire… »

    Cette phrase en soi est amusante : le sexe mâle se reproduirait donc différemment du sexe femelle… ??? 😀

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    • Bonjour,

      En fait, c’est très mal exprimé ! Ce qu’il faut comprendre : le comportement et la stratégie sexuelle (de reproduction) du mâle et de la femelle est différente, et ce, pour la plupart des espèces sexuées… chez les primates elle diffère selon certains critères, notamment d’adaptation !

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  14. Mon dieu…j’ai failli faire une crise cardiaque à la première citation. J’aimerais aller voir cette femme, et lui demander, très sérieusement, si elle me considère comme une espèce de mocheté : je ne veux pas avoir d’enfants (je veux adopter, en fait. A cause de problèmes de dos, une grossesse serait une TRES mauvaise idée, je n’ai absolument aucune envie de subir une lourde opération et risquer des complications), et pourtant, je me « fais belle ». Je connais aussi des gens qui sont homosexuels, et qui se « font beaux » (même des filles, han ! Mais comment cela se fait-ce ? Elles ne veulent pourtant pas se reproduire avec des hommes !). Et les gens stériles sont probablement aussi des êtres humains qui, malgré leur impossibilité de se reproduire, prennent soin d’eux. Alors, on est quoi, tous ? Des faux êtres humains ? Des aliens ? Ses conneries sont au delà de l’insulte. Je considère les gens qui sortent ce genre de théories comme des dangers publics…

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  15. Bonjour,
    Pouvez-vous nous donner les références de ces « dénonciations » :
    « Pourtant, l’objectivité prétendue des sciences non-humaines, en particulier des sciences naturelles, a depuis longtemps été dénoncée comme un mythe ».
    Cela permettrait de voir les arguments développés pour dénoncer les sciences fondamentales comme des mythes.
    Merci.

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  19. Pourquoi ne vous appliquez-vous pas à vous-même la citation de Christine Delphy ?

    Votre connaissance du monde est aussi le produit d’une histoire et d’un système de domination. Elle n’est pas plus neutre qu’une autre…

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    • Évidemment, où avez-vous lu que je péetendais à l’objectivité? Toute connaissance et tous discours sont situés, mais j’ai l’honnêteté intellectuelle (l’honnêteté tout court) de le reconnaître, et cela fait toute la différence.

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  20. Bonjour,

    Je vous ai demandé de m’envoyer des références scientifiques et argumentées et non pas une liste de blogs de personnes qui ont une « approche » personnelle déjà construite ! Puisque vous affirmez que ces découvertes ont été dénoncées comme des mythes, vous devez bien construire cet argumentaire sur quelque chose de sérieux ?
    Je vous remercie de votre réponse en tout cas !

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    • Je n’ai pas encore eu le temps de rassembler une bibliographie mais j’apprécie très, très peu que vous pensiez pouvoir me rappeler ainsi à l’ordre. Pour votre information, je ne vous dois rien et avec un minimum de recherches vous pourriez trouver ces références vous-même – ce que vous n’avez de toute évidence pas essayé de faire. Si le sujet vous intéresse autant, vous pouvez vous référer au livre de Cordelia Fine, Delusions of Gender, qui fait notamment le point sur les théories de la connaissance située (standpoint theories). Il y a aussi les travaux de Linda Harding et Donna Haraway par exemple.

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      • Bonjour,

        Je vous demande simplement vos références et vous tombez dans l’agressivité !
        Je ne vous rappelle point à l’ordre, si vous tenez un blog et que vous déconstruisez un article, si vous êtes vraiment sérieux(se) vous devez pouvoir fournir vos références !
        Si vous « n’avez pas eu le temps » de réunir cette bibliographie, avez-vous seulement ces publications, vu votre hargne, si vous les aviez, vous vous seriez empressée de les utiliser (logiquement) !
        La communication sans violence fait avancer les débats, l’agressivité a tendance à les faire « tourner court »;
        Bien cordialement,

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        • Vous avez toujours réponse à tout, n’est-ce-pas? Je vous donne les références que vous réclamez à deux reprises à grands renforts de points d’exclamation et en sous-entendant qu’elles n’existent pas, et comme je ne me suis pas exécutée assez vite c’est que je ne les ai pas lues, c’est ça? Je n’ai rien à vous prouver et je vous conseille (bien cordialement bien sûr) d’aller voir ailleurs si j’y suis – si possible dans une bibliothèque, histoire de vous cultiver un peu.

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    • Je ne crois pas pour ma part que l’on puisse dire que l’objectivité n’existe pas. Ce qui n’existe pas est une objectivité qui se voudrait absolue, c’est-à-dire pure de tout ancrage socio-culturel (et qui énoncerait elle-même des faits considérés comme bruts, hors de tout système de significations). Autrement dit, une objectivité supra-humaine (divine ?). Le sociologue Pierre Bourdieu a écrit un très bon (et ardu) livre là-dessus : « Science de la science et réflexivité », où il aborde l’objectivité comme une construction intersubjective.

      Les « vérités scientifiques » dénoncées comme des mythes sont des constructions discursives qui ne répondent pas aux critères considérés comme gage de scientificité quant à la démarche et aux méthodes présidant à leur élaboration (représentativité des échantillons, reproductibilité, rigueur dans l’enchaînement logique des raisonnements au lieu de tirer des conclusions de prémisses insuffisantes pour y conduire, etc.). Odile Fillod, citée dans l’article, pratique avec sagacité la déconstruction de tels mythes dans la chaîne qui a pour point de départ une publication dans une revue académique de résultats peu probants et de conclusions très hypothétiques (publications encouragées au passage par le système d’évaluation de la production scientifique par la bibliométrie pour l’obtention et la justification de financements, et les considérations commerciales de certaines entreprises privées finançant des recherche aux fins de vendre un produit – cf. par exemple dans le domaine de la médecine génomique), et pour point d’arrivée des « scoops » dans les médias grands publics, y compris des livres grands publics sur lesquels les « journalistes » se contentent de s’appuyer pour se faire l’écho de « découvertes » hasardeuses et relayer des idées fausses. Je m’emploie également, autant que possible, à la déconstruction de ces mythes biologiques – génétiques, hormonaux, cérébraux.

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  21. Pingback: Mediavox » La tribune qui déchire (sa race)

  22. Nancy Huston et Michel Raymond me font pour le coup penser à M. Ozon. Oui, tout le monde sait bien que les hommes et les femmes sont différents… Faisant appel à une sagesse « populaire » hors de propos, on essaie de nous embrouiller avec de fallacieux arguments de nature…
    On ne peut que leur conseiller vivement de relire les philosophes évoquant l’état de nature, et combien il est complexe de le séparer de la culture… notion évoquée en terminale générale, et sur laquelle se penchent sûrement nos futurs bacheliers.

    Merci en tous cas pour ce très beau billet 😉

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